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mardi 22 août 2017

La visite du Roi de Thaïlande




Atelier d’écriture à Marsanne – le 15 août 2017
Texte écrit autour d’une photo de voyage (Thaïlande)

Je me suis assise sur le bord du lit, épuisée. En prévision de l’arrivée de la smala, j’avais préparé une gigantesque ratatouille, qui continuait à mijoter tranquillement. Pour changer un peu de la routine, j’avais décidé de remplacer l’ail et l’oignon par de l’anis et de la vanille. Eh oui, c’est comme ça qu’on cuisine dans les antipodes, il faudrait bien s’y habituer. Il fallait ébranler tous ces schémas immuables dans lesquels on se laisse emprisonner, par paresse ou par complaisance.

Voilà déjà deux heures que ça mijotait dans la cuisine. Pour que les saveurs terminent leur subtile alchimie, j’ai éteint la cuisinière, laissant les légumes à leur joyeux babil. Je n’avais plus beaucoup de temps pour finir de me préparer : la maison avait été nettoyée et apprêtée, de la cave au grenier. On avait sorti la vaisselle des grandes occasions et déroulé le tapis rouge, qui descendait le long du grand escalier, telle une immense chenille de cérémonie. Le jardinier avait tondu le gazon et taillé les buissons. Il avait choisi les plus belles fleurs du jardin pour agrémenter la table d’une symphonie de couleurs.

La famille élargie allait se réunir pour marquer un grand jour : la visite du roi de Thaïlande en personne, rien que ça. Pour cette occasion, les meubles d’ébène et d’acajou avaient été dépoussiérés et cirés, laissant éclater leur splendeur boisée. Je commençais à regretter d’avoir invité le roi. Qu’est-ce qui m’avait donc pris ? Il est vrai que j’avais une faveur à lui demander, mais j’aurais pu m’y prendre autrement. Je sentais le trac monter en moi, il me fallait un instant de recueillement.
Je me suis rendue au fond du jardin, là où coule un ruisselet et où le paysage se déploie paisiblement. Inspirer….. Expirer…… Inspirer….. Ne penser à rien….. Aïe ! Le saucisson ! La taoïsme l’autorise-t-il ? On n’est jamais trop sûr. La crainte de provoquer un incident diplomatique a réduit à néant mes efforts de méditation zen.


L’orchestre devait être arrivé, on entendait les violons qui s’accordaient. La soirée allait être formidable. Pourvu que les journalistes arrivent à temps. Il faudra les avertir, en cuisine, qu’ils leur mettent quelques rations de côté. Je les connais, ces gaillards…. ils ont un solide appétit ! En repartant d’ici, ils auront mangé pour une semaine. Pourvu qu’on arrive à tenir les anti-monarchistes à l’écart, il faudra à tout prix éviter les échauffourées.

Peut-être que j’avais vu trop grand. Mon ambition me perdra… Je ferais mieux de réduire la voilure à l’avenir. Aujourd’hui, c’était moi la maîtresse de cérémonie. L’avenir des relations helvético-thaïes allait dépendre de l’accueil réservé au roi Bhumibol II de Thaïlande. Heureusement que j’avais un important stock de calamars séchés. Je savais que c’était son plat préféré. Tout était en bonne voie. La soirée pouvait commencer.



NB : toute ressemblance avec des personnages ou des faits historiques réels ne saurait être que le fruit de mon imagination. Ce texte a été rédigé en atelier d’écriture, sans aucune vérification sur internet. Par conséquent, il est parfaitement fantaisiste et ne doit en aucun cas être pris au sérieux.

Mots imposés à placer dans l’ordre, en laissant 2-3 phrases entre chacun :
Ratatouille – immuable – joyeux – chenille – symphonie – boisé – recueillement – saucisson – violon – solide – échauffourée – voilure

Incipit imposé :
« Je me suis assise au bord du lit…. »

Au Fil de la Plume

vendredi 11 août 2017

Le canal de Panama




A man, a plan, a canal : Panama ! *)

De nos jours, le canal de Panama semble être une évidence et pourtant, il n'existe que grâce à la ténacité et à l'obstination d'un grand nombre d'hommes du monde entier. Actuellement, le Nicaragua, avec l’aide de la Chine, envisage de creuser son propre canal pour tenter de concurrencer celui de Panama, visant les juteux revenus de péage qu'un tel ouvrage permettrait de dégager. Les travaux ont d’ailleurs déjà commencé. Ce sera toutefois un chantier aussi titanesque que celui de Panama, les coûts seront pharamineux et l’ouvrage est loin d’être terminé….. 

L'idée d'un canal transocéanique germe déjà dans l'esprit des conquistadors espagnols. Un dénommé Vasco Nuñez de Balboa était le premier à découvrir la côte Pacifique, au sud de l’isthme, en 1513. Dès l'année suivante, la Couronne d'Espagne charge le gouverneur qui a fondé la ville de Panama d'explorer la possibilité d'un passage naturel entre les deux océans. Un Chemin Royal permettra d'abord le transport de marchandises entre le nord et le sud - le Panama s'étendant d'est en ouest, le futur canal suivra par conséquent un tracé nord-sud. Enfin, dès 1527, le fleuve Chagres, le Chemin Royal et le Chemin de Cruces offrent un premier tracé reliant la "mer du nord" à la " mer du sud", à moitié sur la terre, à moitié le long du fleuve.   

C'est Charles Quint qui, le premier, eut l'idée d'ouvrir une voie navigable à travers l'isthme. Le royaume d'Espagne avait même déjà eu l'idée de percer un canal à travers ce qui deviendra le Nicaragua, où la présence d'un lac devait faciliter la chose. À l'époque, il n'y avait évidemment pas de militants écologistes pour s'opposer à un tel projet, contrairement à aujourd'hui. L'idée a fait son chemin au fil des siècles. Alexandre von Humboldt a tracé neuf routes possibles pour un canal.
La région de Panama faisait partie de la Colombie au XIXème siècle. Dès 1852, la Colombie accorde une concession à des entrepreneurs américains pour la construction d'un chemin de fer; en 1878, c'est une société française qui obtient une concession sur 99 ans, afin de construire un canal dans l'isthme de Panama. 
 
La première traversée

La route par le Cap Horn étant longue et dangereuse, le besoin de bâtir un canal à Panama devient de plus en plus impérieux. Ferdinand de Lesseps était devenu célèbre et réputé depuis la construction du canal de Suez (1859-1869), il était donc l’homme tout trouvé pour ce projet ambitieux et téméraire. En effet, non seulement la région est susceptible de subir des tremblements de terre, mais son climat tropical était un obstacle majeur à la réalisation du projet. Un peu comme avec la malédiction de la Grande Pyramide, quasiment toute personne participant à la construction du canal risquait d’y perdre la vie, des suites du paludisme ou de la fièvre jaune. 

Des micro-organismes, virus et parasites, tous deux transmis par les moustiques, ont failli empêcher la construction du canal. C’était sans compter, là aussi, sur l’engagement de plusieurs esprits scientifiques  : entre ceux qui ont découvert l’agent pathogène, ceux qui ont découvert son mode de transmission (les moustiques) et enfin, ceux qui ont découvert le vaccin et les moyens d’éliminer la prolifération des moustiques…. Il a fallu des années et beaucoup de morts pour vaincre ces deux maladies, sans quoi, le Canal de Panama serait resté au stade de chimère impossible à réaliser.

LesEspagnols, les Portugais, les Ecossais, les Allemands, les Français…… tous s’y sont cassé les dents et des milliers d’ouvriers et d’ingénieurs y ont perdu la vie (choléra, paludisme, fièvre jaune, dengue). De plus, les Français se sont empêtrés dans le Scandale de Panama, Ferdinand de Lesseps a été condamné à la prison, le financement de ce projet titanesque ayant échoué de façon calamiteuse. Un chemin de fer traversant le Panama de part en part a également été construit au prix de 12.000 vies. Finalement, ce sont les Américains qui ont repris les tranchées construites et abandonnées par les Français. Ce sont eux qui ont achevé, en 1914, cet immense chantier, auquel tant de personnes ont contribué. Faut-il dès lors s’étonner qu’ils aient obtenu une concession et le droit d’exploitation de l’ouvrage ? 



Toutefois, suite à un référendum organisé au Panama (1977), le canal revient à la république du Panama le 1er janvier 2000. Tant que le canal était aux mains des Américains, le péage ne servait qu’à couvrir les frais d’exploitation. Le Panama, quant à lui, a choisi d’en tirer le profit maximum, faisant payer très cher le passage des navires. Cependant, le pays comporte encore beaucoup de pauvreté, en dépit de cette importante source de richesse. En 2016, le canal a été élargi, en reprenant des tranchées creusées, puis abandonnées par les Français. Ces nouveaux tronçons permettent le passage de navires dits « Panamax » , c’est-à-dire ayant la largeur maximale pour franchir les écluses, tant en largeur qu’en profondeur.
 
Centre des visiteurs de Miraflores
 Le canal de Panama est un ouvrage impressionnant à plus d’un titre : son histoire jalonnée d’échecs, des morts par centaines de milliers, un scandale financier, sa rétrocession par les Etats-Unis, son élargissement…. C’est une véritable prouesse d’ingénierie, qui ne peut se permettre la moindre erreur, le moindre dysfonctionnement. Et il fonctionne sans relâche, 365 jours par an, Noël et Nouvel an inclus !

Plaza de Francia




*) célèbre palindrome

Voir aussi : En mission à Panama  

lundi 26 décembre 2016

En mission à Panama



Panama City

Quand vous dites aux gens que vous partez en mission au Panama, vous avez évidemment droit à des allusions aux Panama Papers, aux comptes secrets et aux valises pleines de billets. Mais le Panama, ce n'est pas que ça! En l'occurrence, il s'agissait d'une conférence internationale sur la sécurité sociale.


Partir pour Panama, ce n'est pas comme partir au Luxembourg - allusions financières mises à part. D’abord, avant de partir, il a fallu faire une demi-douzaine de vaccins: fièvre jaune, typhoïde, hépatite A, polio, grippe (à cause de la grippe aviaire) et acheter de la prévention contre le paludisme (Malarone), ainsi que des sprays anti-moustique, version tropicale.
 
Marchands ambulants au milieu de la route
Afin d'éviter tout ennui avec l'immigration à Panama, il a fallu faire faire un laissez-passer ONU (passeport neutre), faire faire une photo d'identité au format américain et demander un visa pour ce laissez-passer, ce qui était un peu étrange, étant donné qu'avec un passeport suisse, aucun visa n'est nécessaire. Finalement, aucun visa n'était requis. Et j'ai passé le contrôle avec mon passeport suisse, comme une lettre à la poste. Ma foi, on n'est jamais trop prudent.
 
On vous aura averti!
À ce stade, je commençais presque à regretter d'avoir accepté cet engagement, ça devenait carrément un peu lourd et compliqué. En plus, on y allait en pleine saison des pluies. Quels vêtements emporter ? Climat tropical mais pluvieux avec des salles climatisées, donc frigorifiques; prévoir des manches longues à cause des moustiques; emporter un imperméable, des lunettes de soleil, des tongs et un parapluie, des pashminas pour l'intérieur et des bermudas pour l'extérieur; de la crème solaire, de l'anti-moustiques et du gel désinfectant pour les mains. Bref, tout ce qu'on emporte normalement pour aller travailler.


La traversée de l'Atlantique durant environ 11 heures, nous avons eu droit à un vol en business class, ce qui n'était pas du luxe, étant donné que nous devions être en état de travailler à l'arrivée, malgré le décalage horaire. Lufthansa reçoit ten points pour l’accueil, le confort, le service, le repas et le sommeil en position horizontale. Une bonne sélection de divertissements aussi : j'ai pu visionner la moitié de Toni Erdmann, juste assez pour me demander pourquoi tout ce battage autour de ce film. Je me passerai volontiers d'en voir la fin.

À l’escale de Francfort, je suis passée pour la première fois par un contrôle de passeport biométrique automatisé: il fallait entrer dans un sas dans lequel le visage du voyageur est reflété sur la porte en verre de la porte de sortie du sas, comme dans Minority Report, Gattaca ou équivalent. Au retour, toujours à Francfort, c'était le contrôle rayons X avec scan corporel, alors qu'on sortait d'un avion et qu'on était a priori déjà dans une zone contrôlée. Ma foi, ça commence à être la norme de nos jours. Un peu comme le marché de Noël à Strasbourg, où le vieux centre est désormais interdit aux voitures et où les piétons doivent ouvrir leurs sacs avant d'entrer dans l'enceinte sécurisée ; des CRS et des militaires armés qui patrouillent dans les rues ; des camions en travers des ponts pour empêcher un massacre dans le style de Nice ou Berlin. A l'aller, le train avait 1h20 de retard à cause d'un colis suspect en gare de Sélestat. La routine, quoi.... Mais je m'égare.


En arrivant à Panama City, il a fallu poser ses dix doigts sur un lecteur d'empreintes digitales, puis déposer ses bagages aux rayons X avant de sortir de l'aéroport. Chercheraient-ils des armes? Ou des billets de banque ?

Le bus navette de la conférence a mis 1h30 à faire les 22km qui nous séparaient de l'hôtel, à cause des bouchons. En effet, nous devions franchir le Puente de las Americas, seul passage possible. Ce pont porte bien son nom puisqu'il relie littéralement les deux moitiés du continent américain.

Nous étions logés dans l’hôtel de la conférence, le Westin Bonita Playa, très luxueux, avec des chambres immenses, mais avec une climatisation bruyante bien qu’indispensable - y compris les moteurs de la climatisation à l’extérieur, au pied de l’hôtel. J’ai dû dormir avec des bouchons dans les oreilles alors que la chambre était autrement parfaitement silencieuse. Nous avons reçu un bracelet comme à Paléo ou au ClubMed, qui nous donnait droit au forfait All Inclusive, ce qui était bien pratique, surtout pour les repas avec les collègues (pas besoin de faire de longs calculs). Seul bémol pour cet hôtel autrement parfaitement agréable : il y avait de la musique partout, mais absolument partout ! Sauf dans les restaurants, étrangement. En effet, il est impossible de nos jours de manger dans le calme et le zen, notamment le petit-déjeuner. 

Ecluses de Miraflores
La monnaie qui a cours au Panama est le dollar américain, les pièces de monnaie s’appellent cependant des balboa, selon le nom du conquistador qui a découvert la côte du Pacifique. Le casco antiguo (vieille ville) est absolument charmant, mais est en train de se boboïser avec des bars branchés, des restaurants chics, des aliments bio etc. Parmi les choses à voir dans les environs immédiats, il y a bien sûr les écluses de Miraflores et le centre de visiteurs du Canal de Panama, qui est très intéressant. A proximité, on trouve Quarry Hill, qui permet d’avoir une belle vue panoramique sur les environs, mais c’est un site qui est malheureusement fermé les week-end (pratique !). Les gravats de la construction du canal ont permis de construire la Calzada de Amador (Amador Causeway), qui est une chaussée rectiligne qui rattache quatre petites îles au continent. C’est un lieu de loisirs, avec des vélos à louer, des bistrots et quelques boutiques. L’histoire du Canal de Panama est absolument passionnante, mais cela fera l’objet d’un autre texte (voir ICI).
Format de prise



Panama, Puente de las Americas, Corazon del universo